De l’importance du randori « souple »

Pour le définir, il est sans doute plus facile d’évoquer ce qu’il n’est pas : une confrontation dans laquelle l’enjeu mental est de « ne pas perdre » avec une très forte opposition à la garde et dans lequel on s’efforcerait de dominer physiquement l’adversaire, d’étouffer toute tentative de sa part.

Le randori souple est un jeu d’opposition n’excluant en aucun cas l’intensité et l’engagement, mais qui ne se joue pas (ou très peu) à la garde, ni dans l’assujettissement physique du partenaire. Il s’agit plutôt de le surprendre et de le vaincre par la maîtrise des déplacements, des esquives, des rythmes, etc.. Oser « prendre le risque » de laisser le partenaire plus libre dans le randori, le « défier » (amicalement) en adresse et en technique a de considérables avantages : le premier d’entre eux est l’efficacité pour former des judokas de très bon niveau.

Le randori n’est plus un bras-de-fer monotone il devient un espace d’élaboration et de progression particulièrement riche. Les déplacements sont plus nombreux et plus divers, les attaques peuvent être fréquentes, variées et subtiles, les esquives s’enchaînent, ce qui permet de développer considérablement le potentiel technique, l’adresse, la vitesse, et de trouver un relâchement musculaire sans lequel les mouvements sont contraints, sans précision ni puissance – à terme, le randori de pleine opposition ne se distingue du randori souple que dans l’engagement : il apparaît comme une permanente recherche de déséquilibres par confusions, enchaînements, changements de rythme dans un travail en déplacement constant plutôt que comme une confrontation statique, bloquée par l’opposition des forces musculaires et des corps en contraction.

En plus de l’efficacité à moyen terme, ce mode de travail offre d’autres avantages d’importance. Rendre les jeunes élèves aptes à pratiquer et à profiter du randori souple, c’est les amener à prendre conscience et à mûrir en eux, par la pratique, certains fondamentaux du judo comme de l’existence : la présence positive de l’autre, son utilité, la nécessité de l’entraide, la puissance et la valeur des liens affectifs qu’il est possible de tisser avec ses partenaires.

Le randori souple devient le moyen principal de développer sa maîtrise. De progrès en progrès, quel que soit son niveau, il est alors le vecteur de tout ce qui peut garantir une pratique prolongée, soutenue et de qualité : l’émulation et l’engagement, l’échange, la réussite, le plaisir. Ce climat de motivation conditionne les progrès du plus grand nombre et maintient dans l’activité une population qui s’en serait détournée. En outre, la possibilité de progrès étendus et prolongés longtemps après l’âge de l’apogée physique, offre à une population adulte de pratiquer sans lassitude, avec enthousiasme et plaisir.

Différents niveaux d’ âge et de maîtrise peuvent ainsi pratiquer ensemble sans risque traumatique, chacun pouvant apprendre des autres, approfondissant sa conception et sa maîtrise du judo sur un mode plus proche de la notion de rencontre et d’émulation positive que d’exclusion, de fermeture sur soi et d’irrespect.

Source : Fédération française de judo

Merci à M. Patrick Vesin de Judo-Québec pour le partage

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